100% Création poursuit sa série été consacrée aux métiers d'art du Mobilier national, en neuf épisodes. L'atelier restauration mobilier contemporain de l'établissement public dédié aux arts décoratifs joue un rôle essentiel dans la conservation des meubles contemporains en assurant leur entretien, leur restauration et leur mise en valeur dans des lieux emblématiques comme l'Élysée ou les ministères.
Cet épisode est consacré à Sandrine Bandeira, tapissière d'ameublement à l'atelier restauration mobilier contemporain. Avec patience et expertise, son travail, discret mais essentiel, témoigne de son attachement au patrimoine français et conjugue le passé et le futur.
« Nous avons de grands ateliers lumineux, expose-t-elle. Nous travaillons avec du beau textile fabriqué en France. Nous y faisons attention, c'est important de travailler avec de beaux matériaux. Au bout d'un an au Mobilier national, j'ai travaillé avec Pierre Paulin, un designer. C'est un souvenir qui m'a marqué. C'était le premier avec qui j'ai travaillé. Cela étant, j'ai eu Pierre Bocher, Noé Duchaufour-Lawrance, j'ai travaillé pour le Palais de l'Élysée... Nous allons dans des lieux superbes, des ministères, des lieux importants pour la France. Les premières fois, je me suis dit "je suis quand même au palais de l'Élysée !". Mais maintenant, je connais les lieux par cœur. »
Née à Châteaubriant près de Nantes, à l'ouest de la France, Sandrine Bandeira, dès son plus jeune âge, s'est intéressée au métier de tapissier d'ameublement, notamment grâce à une famille de menuisiers, et à la décoration d'intérieur. Elle débute sa formation par un CAP en tapisserie d'ameublement, suivi d'un brevet technique en garniture du siège effectué en alternance. Elle découvre le Mobilier national grâce à des documentaires.
« Des reportages que je voyais à la télévision, et je me disais ''pourquoi pas un jour travailler dans cet institut'', retrace-t-elle. Par le biais de la famille qui était à Paris, j'ai pu passer le concours. Je l'ai eu et je suis arrivée dans cet atelier de restauration de sièges contemporains. Au départ, c'était pour faire la restauration de sièges traditionnels en garniture, comme je l'ai appris. Ensuite, il y a eu une place dans cet atelier qui venait d'être créé par Nathalie Célas. Il y avait un besoin de restauration de sièges contemporains, donc elle m'a pris dans son équipe. Maintenant, je restaure les sièges contemporains, quand on dit ''contemporain'', c'est en mousse. »
Après plusieurs années d'expérience en artisanat et en industrie, elle rejoint le Mobilier national en 2007. Ici, le mobilier contemporain est déterminé par rapport à la garniture. Pour la période traditionnelle de tapisserie, la garniture est en crin d'animal ; pour la période contemporaine, la garniture est en mousse. Tout ce qui est garni en mousse passe donc par l'atelier dans lequel travaille Sandrine Bandeira, où il faut avoir de la curiosité pour de nouvelles matières.
« Même en maîtrisant la mousse, il y en a différentes, avec des façons différentes de poser, fixer. Et c'est cela qui est intéressant, parce que finalement, cela change, explique la tapissière. Un siège traditionnel, il y a des étapes qui ne changent pas, c'est toujours le sanglage, le guindage, la mise en crin. Alors qu'avec la mousse, cela peut être d'autres façons de faire. Il faut toujours jours réfléchir, regarder l'objet terminé avant de le commencer. Il faut avoir l'image de la forme finale en mousse. Alors que le traditionnel, ce sont toujours les mêmes étapes. Bien sûr, il ne faut pas changer l'aspect du siège, trouver des solutions pour rester dans le même modèle que le designer ou l'artiste a dessiné. Rester dans son idée, donc à nous de nous adapter. »
À la réception du mobilier, il y a plusieurs étapes que Sandrine Bandeira renseigne, en détail, dans un document. « Dans un dossier de restauration, nous allons mettre la photo d'avant la restauration dans l'atelier, détaille-t-elle. Tous les sièges ont un numéro d'inventaire – par exemple GMT pour Garde Meuble Tapissier –. Avec un numéro, nous mettons la date du début de la restauration et la date de fin. Comme cela, nous savons combien de temps nous avons passé pour le restaurer. Nous indiquons aussi l'état du textile, de la garniture, s'il y a des rayures, les matériaux à utiliser, les sangles, le tissu et sa référence, le jersey, la couleur, le fil utilisé... Si par exemple sur un siège, sur la housse, il y a une surpiqûre, une couture apparente, la couleur sera indiquée, et la mesure du point pour refaire à l'identique. Ensuite, nous mettons les étapes : le dégarnissage avec des photos d'illustration, la réalisation, des petits échantillons du tissu, du jersey. Et enfin, nous mettons une photo de la restauration terminée. »
La maîtrise des techniques traditionnelles de tapisserie d'ameublement associée à la capacité à intégrer les innovations technologiques, ainsi que des outils adaptés aux sièges contemporains, sont nécessaires à l'exercice du métier de Sandrine Bandeira. « Pour donner la forme, nous utilisons des scies à mousse, indique-t-elle. C'est une sorte de couteau électrique. Souvent, les assises, ce sont des mousses fermes et un peu plus souples au niveau du dossier. Les mousses arrivent en bloc. Nous faisons donc différentes coupes au plus près de nos repères. Cela nous arrive de brosser la mousse pour vraiment donner une forme. Ensuite, il y a de la ouate et le jersey. Dans le traditionnel, le siège est mis en blanc. Dans le contemporain, nous ne mettons pas une toile blanche, mais du jersey qui peut être gris. Il faut donner la forme finale avant de poser le tissu. Nous ne mettons pas le tissu directement sur la mousse. »
Passionnée par la restauration de sièges contemporains, Sandrine Bandeira a collaboré avec des designers de renom comme Pierre Paulin à ses débuts au Mobilier national, et aujourd'hui, elle participe à la restauration du salon crée par le designer français :
« Sur un mobilier comme le canapé Paulin que nous allons restaurer cette année, nous allons consulter les photos, quelques documents à l'atelier de recherche et création, expose-t-elle. Nous nous documentons avec les livres, et puis, nous allons dégarnir, garder le tissu pour voir la quantité qu'il faut. C'est dans le dégarnissage que nous allons apprendre des choses pour commander le cuir. Ici, c'est du cuir retourné. C'est une entreprise extérieure qui est venue pour son expertise sur le cuir. Nous avons échangé pour savoir ce qui pourrait ressembler le plus possible à ce qui était d'origine, retrouver les couleurs, parce qu'il y a eu des nettoyages, des tâches… Au dégarnissage, nous avons vu que la structure en métal était rouillée. C'était la colle néoprène utilisée à l'époque. Aujourd'hui, nous pouvons trouver d'autres moyens avec d'autres colles pour fixer la mousse. La structure doit être nettoyée à l'extérieur. Tout ce qui est structure, nous n'y touchons pas. S'il y a du bois, il y a un atelier au mobilier national qui peut le restaurer. Nous allons faire un dessin, un plan de coupe au niveau de la mousse, au niveau du tissu, tous les matériaux dont nous avons besoin, puis faire des gabarits. Nous travaillons avec l'atelier qui est à côté, l'atelier des tapissières pour faire les housses. Tout ce qui est couture, à la machine ou à la main, est réalisé par les tapissières. »
La veille technologique et la transmission du savoir-faire aux générations futures font également partie intégrante des missions de Sandrine Bandeira afin de maintenir l'excellence française dans le domaine du mobilier d'art. « Je commence à transmettre, livre-t-elle. Dans notre équipe, le plus jeune, c'est Alexandre. À l'origine, il n'est pas tapissier, mais après avoir passé son examen tapissier d'ameublement, comme moi, il est passé par le traditionnel avant d'arriver au contemporain. Il y a donc beaucoup de choses que je lui transmets parce que lui, il a vraiment vu tout ce qui était garniture des sièges. Mais il faut plus que deux ans de formation pour connaître les techniques, les outils à utiliser. Avec Nathalie, nous lui transmettons le savoir-faire du tapissier d'ameublement. Il apprend très vite. Tout le monde a des méthodes différentes. Moi, j'ai appris dans le privé. Puis, quand je suis arrivée ici, il y avait d'autres méthodes. Au début, il faut écouter ceux qui ont l'expérience. Après, avec les années, nous aussi, nous commençons à avoir l'expérience et à choisir la façon avec laquelle nous sommes le plus à l'aise pour travailler. »
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