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Aug 9
11m 42s

Cérile Faucheux, la menuiserie siège au ...

Rfi
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100% Création vous propose cet été, une série, en neuf épisodes, consacrée aux métiers d’art du Mobilier national. Cette institution où plus de 340 professionnels sont répartis dans 26 métiers d’art est un centre d’excellence qui conserve, restaure et valorise des pièces exceptionnelles, allant du mobilier aux textiles ou céramique, datant du XVIIᵉ siècle à nos jours. L’exemple de l’atelier de menuiserie en siège, dirigé par Cérile Faucheux, illustre parfaitement ces métiers.

Ici, on restaure et travaille le bois en volume, en sculptant et tournant des carcasses ainsi que des éléments mobiliers. On s’occupe également de meubles en bois massif, souvent richement décorés : peints, vernis ou encore dorés comme les lits, torchères, consoles ou paravents. « Dans mon métier, il me fallait quelque chose qui me fasse m'évader, le toucher est important et j'ai retrouvé cela dans la menuiserie en siège, puisque c'est essentiellement un travail manuel et un travail de courbe. Nous utilisons tous les sens dans notre métier. »

Cérile Faucheux, artisan d’art et responsable de l’atelier de menuiserie en siège au Mobilier national. « Dans l'établissement, nous sommes au cœur d'une pépite, avec des collections qui sont larges, diversifiées, de très beaux objets. C'est du bonheur au quotidien. Nous avons le temps de pouvoir mettre en œuvre des restaurations. La productivité est plus relative ici puisque l'objectif est plutôt sur la qualité, même si on a des temps à respecter, évidemment. Nous avons l'établissement en lui-même, le lieu, qui est assez magique. Et puis nous sommes amenés à travailler sur des lieux prestigieux et très intéressants. C'est un bonheur. »

Cérile Faucheux a grandi en Île-de-France, passionné par le travail manuel et le bois depuis sa jeunesse, il choisit de se former à l’École Boulle à Paris de 1990 à 1995. Cette formation, axée sur la menuiserie en siège, lui a permis d’acquérir des compétences solides dans la fabrication et la restauration de mobilier ancien. Après la fin de ses études, Cérile Faucheux s’oriente vers le secteur public, privilégiant la qualité du travail à la rapidité ou la productivité.  « J'avais un objectif en sortant de l'école, j'avais une vision du travail bien fait, avoir le temps de faire les choses. Le productivisme ne m'intéressait pas Moi, j'avais décidé que soit je rentrais dans une institution type Mobilier national, soit j'arrêtais mon métier parce que courir après le temps et la productivité ne m'intéressait pas du tout. J'avais cet objectif en partie parce que je connaissais l'établissement, mon professeur à l'école m'avait aiguillé vers le Mobilier national, je l'avais visité à l'époque. Deux ans après ma sortie de l'école, j'ai été contacté pour pouvoir me présenter au concours. Ce que j'ai fait. Dans ce laps de temps, j'avais un emploi. Moi, quand j'étais étudiant, je travaillais dans la vente de papier peint/peinture. J'étais conseiller. Et puis il y a un poste qui s'est libéré au moment où je sortais de l'école, donc cela tombait très bien. J'étais déjà dans la vie active. J'ai fait la liaison avec le Mobilier national en 1997. »

Aujourd’hui Cérile Faucheux est le responsable de l’atelier de menuiserie en siège au Mobilier national. L’expertise de cet atelier porte principalement sur la restauration de sièges anciens, maîtrisant les techniques de démontage, de restitution des éléments manquants, et de conservation fidèle aux techniques d’origine ainsi qu’aux différentes essences de bois. 

« Il n'y a pas tant d'essences que cela pour les périodes sur lesquelles nous travaillons. Notre formation et puis nos habitudes nous amènent à facilement retrouver les essences. Nous mutualisons nos compétences et nos connaissances ici, en atelier. Nous n’avons pas tellement de difficultés sur ce sujet. Le siège, le constituant principal, dans tout ce qui est bois doré, bois peint, c'est essentiellement le hêtre qui a été utilisé pour ses qualités techniques et puis aussi pour sa proximité. Le chêne était plutôt utilisé dans le reste des objets mobiliers et en fonction des époques, des retours de colonies, de voyages, des différents voyages internationaux, des essences exotiques ont été amenées. Nous avons de la chance ici, nous avons constitué des stocks au fur et à mesure de l'histoire de l'établissement. Quand des intervenants ferment boutique, nous rachetons des stocks anciens. Nous avons la chance de ne pas être en pénurie de bois dit rare. Nous travaillons beaucoup sur les acajou d'Amérique, puisque la partie du XIXᵉ siècle est essentiellement constituée de bois verni avec des acajou d'Amérique, puis après des palissandres, des ébènes et puis quelques bois plus européens type noyer, merisier. Mais là déjà, cela devient un petit peu plus rare. Nous intervenons toujours en mesurant les actes et en remplaçant juste ce qui est nécessaire à remplacer. Il peut arriver que si on a des éléments manquants, on les restitue. Donc, là on aura une partie dite de fabrication reconstitution. Mais sinon, les volumes sont assez faibles dans la restauration. »

Passionné par la richesse des collections et la diversité des défis techniques, Cérile Faucheux trouve dans son métier une source d’évasion et d’émerveillement. « Il y a une partie d'aventure puisque même si les objets, en apparence, se ressemblent, c'est toujours une problématique nouvelle. Il y a des problématiques un peu typiques mais il y a toujours quelque chose qu'on n'a pas forcément vu, pas forcément anticipé. Les objets ont tous une histoire différente. Nous voyageons, donc, avec les histoires de ces objets qui sont très particuliers. Notre base de données nous donne des éléments d'information. Il y a des marques aussi sur les objets qui donnent des traces de passage dans telle ou telle institution, lieu de pouvoir, etc. Il y a une histoire à la fois dans la documentation, l'objet, les essences de bois qui sont utilisés, les techniques, c'est quelque chose de très global. Il y a plein d'éléments. Il peut y avoir quelques petites découvertes, des traces qui n'avaient pas été forcément identifiées. C’est notre œil plus technique qui nous amène à déceler des choses. Et on vit aussi à partir des lieux dans lesquels ils ont été. On s'imagine dans certains lieux qui n'existent plus, d'ailleurs, comme le château de Saint-Cloud par exemple, il n'y a plus rien. Donc, on s'imagine un certain nombre de choses. »

En tant que responsable d’atelier, Cérile Faucheux supervise une équipe de huit menuisiers en siège. Cette équipe polyvalente détermine les différentes étapes d’interventions sur l’objet a restauré. « Il y a déjà eu des étapes qui sont des étapes préalables puisqu'il y a des demandeurs, cela peut être des institutions, nos services de conservation, avec différents objectifs, soit un objectif de mise en dépôt, puisque c'est l'essentiel quand même de la fonction de l'établissement, ou alors des prêts pour des musées, des institutions dans le cadre d'expositions temporaires. Cela va, donc, déterminer l'axe de travail, c'est-à-dire le niveau d'intervention sur les objets. Quand un objet arrive, nous savons quel est cet objectif et ensuite nous allons faire un diagnostic, c'est-à-dire qu'à plusieurs nous regardons l'objet, ce qu'il y a à faire comme intervention dessus et nous adaptons à chaque objet les interventions. Quelquefois c'est aussi simplement pour une exposition. Dans ce cas, les interventions vont être minimalistes, simplement pour que ce soit acceptable d'un point de vue visuel et puis faire quelque stabilisation structurelle pour le transport, etc. Sinon, la plupart des objets sur lesquels nous travaillons ont un but d'usage dans le cadre des aménagements, notamment des hautes administrations de l'État. »

La transmission des compétences, la recherche de l’exactitude technique, et la préservation du patrimoine constituent le cœur de métier de Cérile Faucheux. « J'ai appris beaucoup de choses et j'apprends tous les jours. Nous avons des métiers où c'est un peu un cycle sans fin. Il y a toujours quelque chose de nouveau à apprendre. J'ai eu une phase d'adaptation au poste de travail quand je suis arrivée, où mes collègues de l'époque m'ont transmis tous les actes élémentaires de restauration, ce que je fais aussi aujourd'hui auprès de mes collègues plus jeunes. Nous, ce que nous souhaitons, c'est que tout le monde puisse tout faire. Pourquoi ? Parce que quand on se spécialise, la difficulté, c'est quand le spécialiste n'est pas là ou qu'il s'en va. Comment fait-on ? Nous essayons d'être tous polyvalents. Après, effectivement, on a des appétences particulières les uns les autres, des envies et des aptitudes qui ne sont pas les mêmes. Alors là, on fait plutôt travailler sur tel ou tel projet, celui qui va restituer les choses de la meilleure façon. C’est aussi le rôle de l'encadrant : mesurer cela et définir et partager le travail au sein de l'équipe. Mais la notion d'équipe est importante parce qu'il n'y a pas une personne qui sait tout faire, mieux faire que tout le monde. C'est plutôt le complément des avis de chacun. Dans notre métier, on fait un diagnostic collectif minimum à deux et voire des fois trois ou quatre. Un de nos axes c'est la transmission des savoirs faire, c'est inscrit dans les missions de l'établissement, donc on restitue la transmission à différents niveaux. On peut avoir des stagiaires, des gens qui sont en formation de différents niveaux dans l'atelier et puis entre nous aussi, parce que cela, c'est très important. On a des jeunes, là, qui sont là depuis moins de cinq ans, il nous faut une dizaine d'années, le temps qu'ils aient l'ensemble des compétences dont nous avons besoin dans notre métier. »

Sur des projets emblématiques comme celui du trône de Louis XVIII, la restauration implique une coordination avec d’autres ateliers du Mobilier national, des prestataires extérieurs, et des services scientifiques. « Le siège, en définitive, a peu évolué, de 1800 jusqu'à 1950 dans ses méthodes de construction. Nous ne découvrons pas vraiment de nouvelles choses. Par contre, il y a des typologies d'objets qui font que nous nous posons tout un tas de questions. L’année dernière par exemple, nous avons travaillé sur un grand projet avec le musée du Louvre sur la restitution de la salle du trône de Louis XVIII. Nous avions un dais magistral à restaurer et c'était une réelle nouveauté pour nous. C'est des choses que nous ne voyons qu’une fois dans une carrière. Des problématiques, non habituelles, à traiter. Il faut faire un diagnostic et puis de voir quelle est la stratégie à adopter pour qu'on puisse utiliser ces objets et les mettre en place. Nous, on est de toute façon un des maillons de la chaîne puisqu’il y a à la fois les demandeurs, les scientifiques, il y a les différents ateliers en interne du Mobilier national avec qui on peut travailler comme l'atelier de lustrerie, l'atelier de tapisserie, l'atelier de restauration de tapisseries et puis après on travaille aussi avec des prestataires extérieurs, notamment sur ce chantier, nous avons travaillé avec deux prestataires extérieurs puisqu'on n'a pas toutes les compétences ici en interne. Il faut savoir que sur un objet siège, il peut y avoir jusqu'à dix corps de métiers qui travaillent. C'est né de corporations. Chaque métier avait son étape dans la conception d'un siège. Inversement, quand nous restaurons, nous avons les mêmes questions à nous poser. Nous avions notamment un travail avec des doreurs sur bois et avec un sculpteur, puisqu'il y avait des restitutions d'éléments manquants à faire, notamment sur les torchères qui ont été utilisées pour ce trône. »

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