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Depuis quelques semaines, un mot revient avec insistance dans la bouche des grands patrons de la tech : « bulle ». Et le paradoxe est savoureux : ceux-là mêmes qui ont nourri la frénésie autour de l’intelligence artificielle — Sam Altman pour OpenAI et Jeff Bezos pour Amazon — alertent désormais sur les excès du secteur. Pour Bezos, il s’agit d’une « bulle industrielle » : les investisseurs, pris dans l’euphorie, ne savent plus distinguer les projets viables des mirages. Altman, lui, reconnaît qu’une bulle se forme toujours « autour d’un fond de vérité », mais prévient que certains y laisseront des fortunes colossales.
Le constat est partagé par nombre d’analystes. Les valorisations atteignent des sommets vertigineux : OpenAI viserait 500 milliards de dollars, Nvidia dépasse les records historiques, et les géants du numérique ont investi plus de 250 milliards cette année dans des infrastructures gigantesques — « Stargate » chez OpenAI, « Prometheus » chez Meta. Pourtant, la question centrale demeure : ces dépenses produiront-elles un retour sur investissement à la hauteur ? Pour Torsten Sløk, économiste chez Apollo Global, l’histoire rappelle dangereusement celle de la bulle Internet : les entreprises les mieux valorisées sont encore plus chères qu’à la fin des années 1990.
Certains, comme l’entrepreneur Azheem Azhar, se veulent plus rassurants. Les géants actuels disposent, selon lui, de flux de trésorerie solides capables de soutenir leurs ambitions. Mais même avec des bénéfices records, l’équation reste fragile. D’ici 2029, les investissements cumulés dans les centres de données pourraient atteindre 3 000 milliards de dollars, alors que les revenus du secteur ne dépasseraient pas 780 milliards en 2030, selon Citi. Un déficit colossal de financement de l’ordre de 1 500 milliards est déjà anticipé.
À cela s’ajoutent des contraintes physiques : la consommation électrique des usines d’IA pourrait nécessiter une capacité équivalente à tout le parc nucléaire français. Sans nouvelles infrastructures énergétiques, la croissance du secteur pourrait se heurter à un mur matériel. Et même sur le plan économique, les promesses de gains de productivité tardent à se concrétiser : certaines études montrent que les développeurs utilisant des outils d’IA ne sont pas encore plus efficaces.
Reste que, comme souvent dans les grandes révolutions technologiques, ces bulles ne sont pas toujours stériles : elles laissent des infrastructures durables, comme le chemin de fer au XIXᵉ siècle. Mais si l’emballement actuel devait se dégonfler, il pourrait laisser derrière lui non pas des rails, mais des entrepôts remplis de puces obsolètes — et une économie américaine soudain privée de son moteur.
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