Non interconnectée au réseau électrique national, cette collectivité territoriale d'outre-mer française prépare sa propre Programmation pluriannuelle de l'énergie. Le texte doit être soumis au vote en Assemblée plénière de la collectivité le 25 septembre.
Dans ce projet de Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), la Guyane a l'ambition d'être 100% renouvelable dès 2027. Un délai très court d’autant que le texte doit encore franchir plusieurs étapes. Mais la collectivité est déjà bien lancée dans sa décarbonation. Fin 2022, déjà 73% du mix électrique était composé d'énergies renouvelables. « Il y a un gros barrage hydraulique qui fournit entre 40 et 60 voire 70% de de l'électricité », détaille Arnaud Flament, représentant en Guyane du Syndicat des énergies renouvelables (SER). « Et depuis une quinzaine ou une vingtaine d'années, il y a pas mal de projets qui ont vu le jour sur le territoire, des centrales à biomasse, des centrales photovoltaïques ».
Pour 2027, le complément viendra notamment d'une centrale à biocarburant liquide en construction. « Ce sera fabriqué à partir d'huile de colza, explique Pierre Cazelle », chef du département transition énergétique à la collectivité territoriale de Guyane. « Selon toute vraisemblable, ce sera du colza qui sera produit dans l'Hexagone. La centrale consommera, selon nos prévisions actuelles, du moins au début, à peu près 100 000 tonnes de bio-liquide par an. Il faut pour cela à peu près 100 000 hectares de colza. C'est totalement impossible en Guyane, donc il n'y a aucun risque de déforestation liée à une production de colza » pour cette centrale.
Quant aux centrales à biomasse dont dispose déjà la Guyane, Pierre Cazelles assure qu'elles tournent uniquement avec des résidus de bois coupés de manière contrôlée, des résidus provenant de déchets de scierie, le bois coupé pour ouvrir des pistes, ou le défrichement de forêt pour créer des terres agricoles, la Guyane important une grande partie de son alimentation.
Avant les derniers coups de tampons sur la PPE, une consultation publique doit être menée dans les prochains mois. En attendant, Arnaud Flament du Syndicat des énergies renouvelables lui réserve un accueil en demi-teinte. Au SER-Guyane, « on salue la trajectoire de la PPE qui permet d’atteindre le 100% renouvelable. Mais on regrette encore la part laissée au biocarburant importé. Selon les simulations, à l'horizon de la PPE 2033, elle représentera encore entre 15 et 30 % du mix électrique. Et en Guyane, on considère qu’il y a quand même beaucoup de ressources renouvelables endogènes qui pourraient contribuer à l'atteinte de cet objectif ».
Réduire l'utilisation de la future centrale au minimum pour qu'elle ne serve plus que de secours est, assure de son côté Pierre Cazelles, le prochain objectif. « Pour faire cela, nous allons donc porter la puissance installée en photovoltaïque de 60 à 200 mégawatts. Nous allons installer aussi des moyens de stockage, des batteries, explique-t-il Et donc, une fois qu'on aura atteint nos objectifs en 2033, l'utilisation de la centrale du Larivot se fera a minima ».
La Programmation prévoit aussi une part d'éolien. La capacité sera toutefois limitée par la base spatiale de Kourou. Les éoliennes pouvant perturber les radars, il existe une zone d'exclusion. Il faudra également composer avec les oiseaux migrateurs sur le littoral, là où se trouve le potentiel éolien de ce territoire amazonien.
Cet objectif 100% renouvelable concerne les communes du littoral reliées au réseau de distribution de la collectivité territoriale. Pour les communes intérieures, le développement du photovoltaïque est envisagé et les groupes électrogènes à fioul seront remplacés par des alternatives au biocarburant à l'horizon 2030.
In fine, le facteur d'émission de gaz à effet de serre de l'électricité guyanaise devrait être de « 10 grammes par kilowatt/heure selon les calculs de l'Ademe ( NDLR : agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie) » se félicite Pierre Cazelles, « cinq fois moins que la moyenne française », 50 fois moins que la moyenne mondiale.