La mortalité des arbres s'accentue sous climat tempéré en raison de la répétition des sécheresses. Chaque disparition a des conséquences pour le climat, la biodiversité et les arbres eux-mêmes.
Les arbres meurent, et de plus en plus : leur mortalité s'accélère en France avec une augmentation de 80 % en dix ans. Responsable principal : le changement climatique, qui accentue les sécheresses et les canicules. Face à la chaleur et au manque d’eau, le mécanisme de défense des arbres est assez simple. Pour éviter l'évapotranspiration, la perte d'eau par les feuilles, les arbres décident tout simplement de les sacrifier ; ils perdent leurs feuilles, comme on le remarque ces jours-ci sur les trottoirs parisiens. On pourrait se croire en automne.
C’est d’ailleurs le même mécanisme en automne, mais face au froid. À cette période, les arbres entrent en repos, alors qu'en été, ils font le plein d'énergie. Mais sans feuille, les arbres ne peuvent plus faire de photosynthèse et donc fabriquer du sucre grâce au soleil.
Un arbre sans feuille, en plein été, n'est pas forcément mort, mais il est à coup sûr affaibli. Faute d’avoir fait le plein d’énergie, il aura moins de résistance pour faire face aux maladies ou aux attaques de parasite. En France, l’épicéa symbolise ce phénomène. Ce résineux très présent dans l'est du pays, qui garde ses feuilles, ses aiguilles, toute l’année, est l'espèce la plus menacée. Victime de la sécheresse, attaqué par un insecte, le scolyte, l’épicéa est tout simplement en train de disparaitre.
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La mort d'un arbre est-elle aussi grave que la mort d'un humain ? La disparition d'un proche nous rend triste, mais on ne sait pas si les arbres éprouvent de la tristesse. Ce qu'on sait en revanche, c'est que la mort d'un des leurs les affecte d'un point de vue physiologique ; les arbres entretiennent des liens à travers leurs racines et le réseau sous-terrain de champignons. Il peut y avoir, entre eux, une véritable solidarité. Par exemple, en période de stress hydrique, de manque d'eau, un arbre davantage protégé du soleil pourra, par ses racines, offrir de l'eau à un voisin. Tous les arbres n'ont pas tous les mêmes besoins en même temps, et on sait que deux arbres de deux essences différentes peuvent aussi s'échanger des éléments nutritifs en fonction de leurs besoins du moment. Un arbre qui meurt est une perte pour ses voisins, et jusqu'à une centaine de mètres. En communiquant par les airs, en émettant des molécules, un arbre peut prévenir un autre d'une attaque de parasites.
Un arbre mort peut même être un danger pour les autres arbres. Quand on veut faire du feu, on choisit du bois mort pour qu’il brûle bien. Les incendies fonctionnent comme une cheminée ou un brasero ; un arbre mort est un combustible pour les flammes, et l'aggravation des feux de forêt s'explique aussi par la présence de ces cadavres d'arbres.
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La perte d’un arbre est un aussi problème parce que l’arbre a un rôle écologique. Il est un allié face à la crise climatique provoqué par un excédent de CO2. Les forêts sont des puits de carbone. En principe : pour ne prendre que l'exemple de la France, dans la région Grand Est et en Corse, les forêts émettent aujourd'hui plus de CO2 qu'elles n'en captent. Un arbre est aussi utile pour lutter contre l'érosion des sols, les glissements de terrain en cas de fortes pluies. Et puis pour les animaux, des oiseaux, des insectes et des mammifères, il offre de la nourriture, il sert de refuge, de dortoir, de nid. La mort d'un arbre, c'est comme un immeuble qui s'écroule.
Certes, quand un arbre meurt, on peut en planter un autre, mais pas partout évidemment. Surtout, un jeune arbre qu'on vient de planter n'a pas du tout la même valeur qu'un arbre cinquantenaire. Sur le CO2 par exemple, un individu de 50 ans capte chaque année environ cinq fois plus de carbone qu'un arbre d'une dizaine d'années.
Pour finir sur une note un peu plus positive, il faut souligner qu’un arbre mort peut avoir son utilité. Des champignons, des insectes, s'en nourrissent ou en font leur maison. Il y a même un nom pour ces arbres couchés sur le sol : on les appelle des troncs nurseries, parce qu'en se décomposant, ils favorisent les semis d'une nouvelle végétation. Un arbre mort, c'est parfois aussi de la vie.
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