L’idée paraît contre-intuitive : comment imaginer de la glace au cœur brûlant d’une planète géante comme Jupiter ou Neptune, où les températures atteignent plusieurs milliers de degrés ? Et pourtant, les scientifiques ont découvert qu’une forme particulière de glace pourrait bel et bien exister dans ces profondeurs extrêmes.
Voyons pourquoi.
Tout repose sur la physique de l’eau et sur un concept clé : le rôle de la pression.
Nous avons l’habitude de penser que la glace se forme quand la température descend en dessous de 0 °C. Mais c’est vrai uniquement à pression atmosphérique normale. Dès que la pression augmente, le comportement de l’eau change radicalement.
Dans l’intérieur des planètes géantes, la pression est colossale : plusieurs millions, voire des centaines de millions de fois la pression terrestre. Par exemple, dans le manteau de Neptune ou dans les couches profondes d’Uranus, on atteint facilement des pressions de l’ordre de 500 GPa (gigapascals), soit plus de 5 millions d’atmosphères.
Or, à ces pressions, l’eau adopte des phases exotiques de glace, appelées glace VII, glace X, ou même des phases dites "superioniques", qui n’ont rien à voir avec la glace que nous connaissons.
Prenons la glace superionique, récemment étudiée par des équipes comme celle du laboratoire Livermore en Californie :
Dans cette phase, les atomes d’oxygène forment une structure cristalline fixe, rigide comme un solide. Mais les protons d’hydrogène, eux, restent mobiles, circulant à l’intérieur de ce réseau.
Résultat : une "glace" qui est à la fois solide dans sa structure et partiellement fluide dans son comportement électrique — un état totalement inédit !
Cette glace peut exister à des températures de plusieurs milliers de degrés Kelvin (jusqu’à 5 000 K), tant que la pression est suffisante.
C’est ce qui explique pourquoi, même sous une chaleur intense, l’eau compressée en profondeur dans une planète peut rester sous forme de glace.
Ces phases de glace ont des implications majeures :
Elles pourraient influencer le champ magnétique des planètes.
Elles jouent un rôle dans la convection interne.
Elles expliquent partiellement les anomalies de densité observées par les sondes spatiales.
Ainsi, dans l’univers des planètes géantes, la glace n’est pas forcément froide : elle est le produit d’un équilibre entre température et pression extrêmes.
Un merveilleux exemple de la diversité des états de la matière dans le cosmos.
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