Visage pâle et chevelure blanche : le lanceur d’alerte Julian Assange était régulièrement à la Une des journaux depuis près de 14 ans. Depuis que la justice américaine lui reprochait d’avoir rendu publics plus de 700.000 documents confidentiels sur les activités militaires et diplomatiques des Etats-Unis, en particulier en Irak et en Afghanistan.
Julian Assange est donc une nouvelle fois à la Une de quasiment tous les journaux ce matin, ou du moins de leurs sites internet.
« Julian Assange libéré de prison, après avoir conclu un accord avec le ministère américain de la Justice », s’exclame le Guardian à Londres.
« Accord avec la justice américaine : Julian Assange en route vers la liberté », lance Die Welt à Berlin.
« Julian Assange accepte de plaider coupable en échange de sa libération », précise le New York Times.
« La longue saga de Julian Assange devrait enfin prendre fin », pointe le Washington Post.
Hier, les événements se sont précipités, relate Le Monde à Paris : « l’Australien de 52 ans a quitté la prison de Belmarsh dans la matinée puis a été libéré par la justice britannique à l’aéroport londonien de Stansted dans l’après-midi, d’où il a embarqué à bord d’un avion et a quitté le Royaume-Uni. »
Désormais, poursuit Le Monde, « l’Australien est route pour le Pacifique, où il doit comparaître devant un tribunal fédéral des îles Mariannes, territoire américain. Il devrait plaider coupable de “complot pour obtenir et divulguer des informations relevant de la défense nationale“. Une audience est prévue dans l’archipel demain mercredi à 9 heures (heure locale) pour fixer la condamnation de Julian Assange. Ce dernier devrait se voir infliger une peine d’emprisonnement de 62 mois, soit une détention qu’il a déjà purgée (au Royaume-Uni), et quitter libre le tribunal, ce qui lui permettrait de regagner son Australie natale. »
Apparemment, les autorités australiennes ont joué un rôle important dans sa libération, précise le Guardian à Londres : « en février dernier, le Parlement australien avait adopté une motion appelant les gouvernements américain et britannique à autoriser Assange à retourner dans son pays natal. Puis, en avril, le président américain Joe Biden avait déclaré qu’il envisageait d’accepter une demande de l’Australie visant à abandonner les poursuites contre Assange. Et hier, sa mère a déclaré que la fin de son “calvaire“ était due à une “diplomatie discrète“, tandis que son père remerciait le Premier ministre australien, Anthony Albanese. »
« La longue bataille juridique autour de Julian Assange devrait enfin s’achever », commente le Washington Post. « C’est un drame tentaculaire, presque surréaliste, impliquant les États-Unis, la Grande-Bretagne, la Suède, l’Équateur et l’Australie. Un drame qui a vu le fondateur de Wikileaks rester confiné dans des pièces exiguës et être détenu en cellule pendant un quart de sa vie. Son parcours, émaillé de piratages de données, de fuites, d’emprisonnement, de coups de théâtres judiciaires est à la fois inspirant, effrayant, déprimant - selon la façon dont on considère le personnage.
L'affaire a soulevé, sans jamais y répondre définitivement, des questions essentielles sur ce que signifie être un journaliste et un lanceur d’alerte. »
Et le Washington Post de s’interroger : « était-il un “acteur non étatique menaçant la sécurité nationale des États-Unis“, comme l’a prétendu un jour le directeur de la CIA Mike Pompeo ? Ou bien un héros, comme le croient ses nombreux partisans qui se sont rassemblés à maintes reprises devant les tribunaux britanniques, tandis que ses avocats luttaient contre son extradition vers les États-Unis. »
Pour The Australian à Sydney, « Julian Assange devrait être récompensé pour services rendus à la vérité. Le fondateur de Wikileaks a réussi à se mettre à dos non seulement le gouvernement américain, mais aussi les élites de gauche et de droite du monde entier. Mais le monde a été grâce à lui beaucoup mieux informé. »
Enfin, la plateforme Wikileaks ne cache pas sa joie. Son communiqué est cité notamment par Libération à Paris : « nous avons publié des informations inédites sur la corruption des gouvernements et les violations des droits humains, obligeant les puissants à rendre compte de leurs actes. En tant que rédacteur en chef, Julian a payé sévèrement pour ces principes et pour le droit du peuple de savoir. (…) La liberté de Julian est notre liberté. Après plus de cinq ans dans une cellule de 2 mètres sur 3, isolé 23 heures par jour, il sera bientôt réuni avec son épouse Stella et leurs deux enfants, qui n’ont connu leur père que derrière les barreaux. »