« Le Premier ministre israélien est connu pour être un homme qui aime jouer avec le temps et reporter les grandes décisions. Mais, note le New York Times, il risque de ne plus pouvoir le faire très longtemps. »
En effet, Benyamin Netanyahu est coincé. Le quotidien américain précise : « Sur le plan intérieur, ses partenaires de la coalition d’extrême droite menacent de faire éclater le gouvernement s’il accepte un cessez-le-feu et ne tente pas de chasser le Hamas de Rafah, dans le sud de la bande de Gaza. (…) Mais sur le plan diplomatique, ses alliés, en particulier les États-Unis, le poussent à accepter un cessez-le-feu et à renoncer à Rafah et aux victimes civiles potentielles qu’une opération de grande envergure entraînerait. »
En fait, analyse le Guardian à Londres, « Netanyahu est pris dans un piège qu’il a lui-même créé, voué à mener une guerre sans fin et impossible à gagner. (…) Il a choisi délibérément de poursuivre la guerre. Il craint que même une trêve ou une pause, sans parler d’une paix durable, puisse accélérer sa chute politique, sa défenestration en tant que Premier ministre et, potentiellement, sa condamnation devant un tribunal pour diverses accusations de longue date pour corruption. Au pouvoir, il est protégé. À court de puissance, il serait grillé ». Finalement, ironise le Guardian, « espérer que Netanyahu fasse ce qu’il faut, c’est un peu comme espérer qu’il ne pleuve pas à Manchester ».
Mais, attention, conclut le quotidien britannique, « si Netanyahu continue d’ignorer toutes les injonctions de paix, apparemment pour maintenir la pression sur le Hamas, mais en réalité parce qu’il essaie de sauver sa peau, les États-Unis doivent réduire leur aide à Israël, imposer des sanctions immédiates – et soutenir publiquement l’inculpation de Netanyahu pour crimes de guerre ».
Le Temps à Genève ne se prive pas non plus de tirer à boulets rouges sur le Premier ministre israélien : « Le raisonnement de Benyamin Netanyahu est sans appel, écrit le journal : Israël est déterminé "à se défendre", même s’il doit "rester seul" et avoir raison contre tous. Rafah peut mourir. Le paradoxe, bien sûr, c’est que le Premier ministre israélien ne cesse de chercher l’approbation indéfectible de l’Occident pour mieux s’enfoncer dans son entêtement solitaire. Deux choix, pointe Le Temps, s’offrent aujourd’hui aux amis des Israéliens et des Palestiniens – ce qui ne devrait pas être antinomique, même aujourd’hui. Ils devront s’employer à gérer, chez eux, les contrecoups en cascade d’une politique israélienne qu’ils jugent, au fond d’eux-mêmes, de plus en plus catastrophique. Ou ils devront, avant que Rafah et Gaza finissent de partir en fumée, agir de toutes leurs forces, à la racine, pour mettre fin à ce cauchemar. »
Pour Haaretz à Tel Aviv, une seule solution : « Israël doit dire oui à un accord sur les otages, et non à la conquête de Rafah. (…) L’opération militaire à Rafah ne fera pas avancer la libération des otages. Au contraire, elle nuira à cette perspective et risque également d’aggraver l’ampleur de la catastrophe humanitaire dans la bande de Gaza et d’alourdir le bilan des victimes gazaouies. (…) Hier, relève Haaretz, la délégation israélienne aux négociations a atterri au Caire et il a également été rapporté que la délégation du Hamas s'y trouve désormais. Le moment est (donc) venu de mettre de côté le populisme de certains ministres comme Ben-Gvir et Smotrich et celui des autres membres d’extrême droite du cabinet, de faire preuve de leadership et de prendre les bonnes décisions. La seule façon de rendre les otages, conclut le quotidien israélien, est d’agir avec courage et de signer un accord, même s’il implique un prix douloureux. »
En attendant, soupire Le Figaro à Paris, « cette nouvelle donne pourrait avoir des conséquences catastrophiques à court terme. Dans le sud, les terminaux de Kerem Shalom et de Rafah sont bloqués. C’est par là qu’entre l’essentiel de l’aide humanitaire, seule source d’approvisionnement pour les 2,5 millions de Palestiniens de la bande de Gaza. Les Nations unies ont fait part hier [7 mai, NDLR] de leur inquiétude : les besoins sont tels dans la bande de Gaza qu’il n’y a quasiment aucune réserve d’essence ni de nourriture. Et selon le Programme alimentaire mondial, c’est déjà la famine dans le nord ».