Le milieu des start-up reste très majoritairement masculin. On le constate en parcourant le plus grand salon européen dédié aux entreprises innovantes, VivaTech, qui s’est ouvert à Paris ce mercredi 14 juin.
Dans les allées du salon, on aperçoit moins de femmes, en particulier sur les stands de start-up (jeunes pousses) du domaine de la défense, de la cybersécurité ou de l’intelligence artificielle. Les entrepreneuses se trouvent plus souvent à la tête d’initiatives dédiées à la santé ou encore aux loisirs. Le constat est encore plus frappant si l'on se penche sur les chiffres disponibles à ce sujet. En 2022, moins d'un quart des start-up créées comptaient au moins une femme parmi les fondateurs, d’après une étude menée dans cinq pays (France, Allemagne, Royaume-Uni, Espagne et Suède) par le collectif français de start-up Sista et BCG, un cabinet de conseil international. Seules 10% des start-up ont été créées uniquement par des femmes. Les ordres de grandeur sont les mêmes aux États-Unis.
Pire, les femmes obtiennent beaucoup moins d'argent lors des levées de fonds : leurs projets ont reçu seulement 2% du total des sommes engagées l'an dernier, selon le collectif Sista et BCG. Pour les salariées, les chiffres sont, là encore, peu encourageants. Elles sont encore moins payées par rapport aux hommes que dans d'autres secteurs. Aux États-Unis, près de la moitié d'entre elles quittent la tech avant 35 ans.
De nombreuses raisons expliquent ce décalage. Au collège et au lycée, les filles sont souvent moins nombreuses dans les filières scientifiques, c’est le cas en France par exemple. L'écart s'accentue encore dans les études d'ingénieurs ou encore de développement informatique, des filières particulièrement importantes dans le milieu de la tech.
Les femmes ont aussi moins de modèles d'entrepreneuses à qui elles pourraient s'identifier dans ce domaine. Enfin, il existe à différentes étapes une part d'auto-censure. Quand des femmes parviennent tout de même à entrer dans ce milieu, elles se retrouvent dans des cercles très masculins, confrontées à des remarques sexistes notamment.
Les différentes étapes de levées de fonds sont un obstacle supplémentaire pour les femmes. Elles sont face à des investisseurs principalement masculins, qui font plus facilement confiance à d'autres hommes ou à des profils qu'ils connaissent déjà : ce sont des biais en partie inconscients.
Enfin, la question du réseau est très importante. Là encore, les hommes ultra-majoritaires vont plus facilement recommander leurs amis masculins.
Ces mécanismes d’exclusion des femmes ne semblent pas se justifier par des critères économiques ou financiers. Plusieurs études américaines ont conclu récemment que les start-up fondées par des femmes ont de meilleurs résultats que celles fondées par des hommes, et que le retour sur investissement qu'elles permettent est près de 30% plus important en moyenne.
Cela ne signifie pas que les femmes sont intrinsèquement meilleures, ni qu'elles font toujours mieux. Mais, plus généralement, ces études menées par des cabinets de conseil concluent que la diversité - sociale, de genre, d’origine - au sein de la direction d'une entreprise fait souvent émerger des idées plus originales, ou des réponses moins conventionnelles aux différents problèmes rencontrés.
Des incubateurs de start-up dédiés aux femmes ont été créés dans de nombreux pays. En France, le collectif Sista pousse les investisseurs à s'engager à avoir dans leur portefeuille au moins un tiers de start-up cofondées par des femmes, d'ici à 2030. Ce collectif a créé son propre fonds d'investissement pour financer en priorité des start-up détenues par des femmes. La jeune pousse 50inTech promeut une plus grande présence des femmes dans la tech. D'autres exemples existent, aux États-Unis notamment.
Mais la situation ne s'améliore pas vraiment. L'inflation actuelle réduit les possibilités de financement pour tout le secteur de la tech. Et comme face à chaque crise, les femmes sont les premières touchées. L'an dernier aux États-Unis, elles ont eu encore plus de difficultés à lever des fonds, par rapport aux années précédentes.