logo
episode-header-image
Aug 19
10m 59s

Mali: cinq ans après le putsch, «on est ...

Rfi
About this episode

Il y a cinq ans au Mali, les militaires renversaient le président Ibrahim Boubacar Keïta. Ils mènent ensuite un second coup d'État pour renverser le président de transition Bah N’Daw qu’ils avaient installé au pouvoir, tout en occupant les postes clés. La lutte contre le jihadisme, la dissolution des partis politiques, le souverainisme comme moteur politique. Cinq après, quel est le bilan ? Oumar Berté est chercheur associé à l'Université de Rouen en politique et droit public.

RFI :  La semaine dernière, la junte malienne a annoncé l'arrestation de plusieurs militaires au sein de l'armée, au moins 55 d'après les sources de RFI. Tous sont accusés d'avoir voulu « déstabiliser les institutions de la République ». Comment appréciez-vous ces événements alors que les militaires viennent de marquer leur cinquième année au pouvoir ?

Oumar Berté : C'est la première fois que les autorités militaires au pouvoir au Mali enregistrent ce que l'on pourrait appeler un véritable coup d'État au sein de l'armée malienne. Ces arrestations interviennent dans un contexte assez particulier pour l'armée car elle enregistre en ce moment d'énormes attaques de groupes armés rebelles, mais aussi terroristes. On peut s'interroger si cette situation qui arrive dans ce contexte ne pourrait pas avoir une implication sur l'armée malienne, comme une désorganisation de la chaîne de commandement, voire un règlement de comptes au sein de l'armée, comme cela s'est passé en 2013.

Parmi les suspects interpellés, il y a un citoyen français, un certain Yann Vézilierque Bamako accuse d'être un espion, mais surtout d'être celui qui, selon le communiqué de la junte, « a mobilisé les généraux Abass Dembélé et Nema Sagara ». Paris, de son côté, dément ces accusations et le présente comme un simple membre de son ambassade au Mali. Là encore, que dire de ce nouveau bras de fer entre les deux pays ?

Toutes les fois où il y a une situation concernant les autorités au pouvoir qui serait susceptible de les mettre en difficulté, elles cherchent toujours à y impliquer la France. Et à chaque fois, ça fait mouche, considérant que la France serait toujours derrière tout ce qui arrive au Mali pour déstabiliser les autorités au pouvoir. C'est un classique, en réalité. 

À lire aussiMali : cinq ans après le putsch, le pays reste plongé dans l'incertitude

Le principal argument des militaires pour justifier le putsch de 2020 était la lutte contre la menace jihadiste et les groupes armés, ainsi que la reconquête de l'ensemble du territoire malien. Aujourd'hui, quel bilan faites-vous de cette lutte et de cette reconquête ?

Des efforts remarquables ont été faits, notamment dans la formation des militaires. Mais la situation sécuritaire du pays est particulièrement préoccupante aujourd'hui. Du nord au sud, le centre, l'ouest, toutes les parties du pays enregistrent des attaques des groupes armés. Au cœur même de Bamako, une attaque coordonnée d'une grande envergure a même détruit et mis hors d'usage l'avion présidentiel. 

L'armée française, arrivée en 2013 au Mali, a été expulsée du pays au profit du groupe de mercenaires russe Wagner. Son principal fait d'armes, aux côtés des Forces maliennes, c'est sa victoire dans la ville de Kidal, reprise aux rebelles il y a bientôt deux ans. Mais suite à cela, les partenaires russes ont essuyé de nombreuses défaites jusqu'à annoncer leur départ en juin dernier. Que peut apporter de nouveau son remplaçant, toujours russe, Africa Corps ?

Wagner n'a pas atteint les objectifs qui lui étaient assignés. Il y a aussi des questions financières à ne pas exclure. La Russie veut prendre directement le contrôle de cette question, d'autant plus qu'au-delà de la question des finances que l'État malien verse pour ce groupe mercenaire, il y a l'accaparement des sites miniers que Wagner engrangeait au profit de la société. Il va sans dire que c'est l'État russe qui va maintenant s'en approprier.

Sur le plan de la conservation des acquis démocratiques, il y a objectivement un net recul. Les partis politiques sont dissous, les médias sont régulièrement sanctionnés. Selon vous, à quel moment situez-vous la bascule de la junte, si on peut le dire ainsi ?

En réalité, le gouvernement de transition du Mali a basculé en 2021 lorsque Assimi Goïta a repris la tête du pays. On est arrivé aujourd'hui à un point de non-retour, c'est-à-dire que les autorités de transition sont complètement décomplexées dans la limitation des libertés fondamentales.

Le Mali, avec ses deux voisins, le Burkina Faso et le Niger, ont décidé de quitter la CEDEAO pour former l'Alliance des États du Sahel (AES). Quels sont les bénéfices de cette alliance pour le Mali ?

À l'exception de quelques rencontres, il n'y a en réalité aucune action concrète que l'Alliance des États du Sahel a pu mettre en place. Aujourd'hui, l'AES ne dispose d'aucun fonds pour financer quoi que ce soit. Au-delà de la solidarité entre les trois pays et de la facilitation de la coopération militaire dans la lutte contre le terrorisme, qui peine d'ailleurs à trouver les résultats escomptés, en réalité l'alliance des États du Sahel n'a pas vraiment mis en place d'actions concrètes.

À lire aussiMali : cinq ans après le putsch, le pays reste plongé dans l'incertitude

Up next
Today
Est de la RDC: «Nous proposons d'acheminer les médicaments», dit François Moreillon, de la Croix-Rouge
Urgence médicaments dans l'est de la République démocratique du Congo. Dans les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, plus de 80% des centres de santé connaissent de graves ruptures de stocks de médicaments. Et ceux-ci sont souvent essentiels à la survie des patients. C'est le c ... Show More
11m 26s
Yesterday
RDC: «Nous travaillons pour atteindre un objectif, la paix durable» affirme Jacquemain Shabani
En RDC, des combats ont repris depuis quelques jours dans l'Est du pays, mais le gouvernement refuse de dramatiser. « Les indicateurs sur le retrait des troupes rwandaises de notre territoire ne sont pas encore visibles, mais nous sommes confiants qu'on va atteindre l'objectif de ... Show More
21m 22s
Oct 7
Khaled el-Enany: «Je veux d'une Unesco qui a de l'impact sur la vie des gens au delà du patrimoine culturel»
Il vient de remporter une victoire éclatante. Khaled el-Enany a été élu lundi 6 octobre directeur général de l’Unesco, avec 55 voix sur 57. L’égyptologue, ancien ministre du Tourisme et des Antiquités, devient le premier Arabe et le deuxième Africain à prendre la tête de l’Organi ... Show More
4m 18s
Recommended Episodes
Aug 21
Les grands boycotts de l'Histoire: faire tomber l'apartheid en Afrique du Sud
Nouvel épisode de la série les grands boycotts de l'Histoire, où quand des mouvements sociaux et politiques utilisent l'arme économique pour lutter contre l'oppression. De l'Irlande à Israël en passant par l'Inde, du lait en poudre au pétrole et aux bus de Montgomery, le boycott ... Show More
2m 51s
Oct 6
L'économie israélienne de plus en plus fragilisée par son isolement international
Longtemps présentée comme la « start-up nation », Israël traverse aujourd’hui une période de turbulences économiques. Guerre à Gaza, tensions régionales et désengagement de partenaires historiques plongent l’économie israélienne dans l’incertitude. Croissance en recul, fuite des ... Show More
3m 26s
Jul 11
Israël: comment le pays en guerre bat des records sur les marchés financiers
Malgré un contexte géopolitique sous haute tension, l’économie israélienne affiche des résultats spectaculaires sur les marchés financiers. Portée par un secteur bancaire solide, une industrie de la défense en plein essor et un écosystème technologique résilient, Israël étonne le ... Show More
3m 28s
Feb 2024
Gomme arabique, la crise en mer Rouge s'ajoute à la crise au Soudan
La crise soudanaise qui dure depuis bientôt 10 mois a perturbé le commerce de la gomme arabique, un additif naturel très utilisé dans les industries agro-alimentaires, cosmétiques et pharmaceutiques. Depuis janvier, la crise en mer Rouge est venue complexifier un peu plus la situ ... Show More
1m 41s
Nov 2024
Michel Barnier, une censure inéluctable ? - Ian Brossat est l'invité des 4V du 30 novembre 2024
Plus de deux ans après le début de la guerre en Ukraine, le monde est plongé dans une crise d’une ampleur inédite depuis des décennies. Ce conflit, marqué par des violences inouïes, des déplacements massifs de populations, et une escalade militaire inquiétante, menace de s’étendr ... Show More
7m 30s
May 2025
#472 - Jean-Marc Jancovici - The Shift Project, Carbone4 - L’Europe est dans la seringue : ce qui doit changer dans les 10 prochaines années
La fin de l’abondance énergétique a déjà commencé.Le déclin de l’Europe est acté pour beaucoup. Mais rares sont ceux qui en comprennent la cause profonde : une crise énergétique systémique.Jean-Marc Jancovici tire la sonnette d’alarme depuis 20 ans. Et cette fois, l’échéance est ... Show More
2h 51m
Nov 2023
Sultan al-Jaber, un président controversé pour la COP28
À deux jours de l’ouverture de la COP28 à Dubaï, son président Sultan al-Jaber vient d’être pris en flagrant délit de conflit d’intérêt. D’après la BBC, en marge de la conférence où l'on discutera de la sortie des énergies fossiles, il prépare des rencontres pour promouvoir les i ... Show More
3m 22s
Aug 29
Les grands boycotts de l'histoire: les internautes contre le «made in USA» de l'ère Trump
Pour ce dernier épisode de notre série boycott, retour quelques mois en arrière, en mars 2025, avec des appels qui se multiplient sur les réseaux sociaux pour ne plus acheter de produits américains. Cette initiative qui prend sa source au Canada et en Europe du Nord fait partie d ... Show More
4m 29s
Dec 2024
LE GRAND ISRAËL DE NETHANYAOU AVANCE ET DÉTRUIRA TOUT SUR SON PASSAGE ! | RADJAA ABOUDAGA | GPTV
Le 9 décembre 2024, François Martin, Sylvain Baron, Radjaa Abou Dagga et Mathias Leboeuf étaient les invités de La Grande Émission, animée par Mike Borowski, sur Géopolitique Profonde. Israël, acteur clé de la scène géopolitique, fait face à des tensions internationales et des cr ... Show More
1h 36m