Un projet controversé, censé transformer la bande de Gaza en destination de luxe, refait surface après des révélations du Financial Times. Au centre du scandale, le prestigieux cabinet de conseil Boston Consulting Group, accusé d’avoir joué un rôle bien plus large que prévu dans l’élaboration d’un plan visant à déplacer massivement la population palestinienne.
Le projet « Gaza Riviera » refait parler de lui. Imaginé dans le cadre du plan de paix proposé par l’administration Trump, il ambitionnait de transformer la bande de Gaza en un centre touristique de luxe, avec hôtels haut de gamme, îles artificielles et pôles high-tech. Une vision digne de la Côte d’Azur, mais transposée au Moyen-Orient. Selon des révélations du Financial Times, l’un des cabinets de conseil les plus influents au monde, le Boston Consulting Group (BCG), aurait apporté un soutien technique et financier à ce projet. Le BCG aurait notamment développé des modèles financiers destinés à inciter jusqu’à 500 000 Palestiniens, soit environ 25 % de la population gazaouie, à quitter l’enclave. Coût estimé : 9 000 dollars par personne, soit près de cinq milliards de dollars au total. Un autre scénario étudié évoquait une prime de départ de 5 000 dollars, accompagnée d’un loyer subventionné pendant quatre ans et de nourriture gratuite pendant un an. Des calculs jugés troublants puisque le cabinet aurait conclu que déplacer les populations coûterait moins cher que de reconstruire sur place.
Ces révélations tombent à un moment délicat pour le Boston Consulting Group. Ces dernières semaines, l’entreprise avait déjà été éclaboussée par sa participation à la Fondation Humanitaire pour Gaza, un projet fortement critiqué pour sa gestion de l’aide humanitaire en dehors des cadres et institutions internationales, avec le soutien des États-Unis et d’Israël. Face à la polémique, BCG avait dû se retirer du projet, déclencher une enquête interne et présenter ses excuses. La découverte de son implication dans le « Gaza Riviera » tombe ainsi mal. Car selon le Financial Times, le rôle de BCG dans ce projet dépassait largement la simple modélisation financière. Le cabinet aurait été impliqué dans la stratégie commerciale, la conception opérationnelle et même les volets sécuritaires du plan. Un contrat de quatre millions de dollars aurait été signé, et une douzaine de consultants mobilisés. La direction affirme que ces travaux ont été réalisés sans validation officielle, mais les preuves montrent une implication interne structurée.
Le scandale ne s’arrête pas là. Deux membres de l’Institut Tony Blair, du nom de l’ancien Premier ministre britannique, sont également cités dans les documents, laissant entrevoir des ramifications bien plus larges que prévu. Face au tollé, le BCG a licencié deux associés seniors en charge du projet et a renoncé aux quatre millions de dollars d’honoraires. Le cabinet a également retiré précipitamment son équipe basée à Tel Aviv. Au-delà des répercussions financières et réputationnelles, cette affaire met en lumière les liens opaques entre cabinets de conseil, opérations militaires et projets humanitaires. Elle interroge profondément sur les limites éthiques de certaines interventions dans des zones de conflit, et sur le rôle officieux que peuvent jouer ces grandes entreprises dans la géopolitique mondiale.