Depuis l’ouverture du procès des violeurs de Mazan le 2 septembre dernier, les médias internationaux se bousculent au tribunal d’Avignon. Des dizaines et des dizaines de journalistes étrangers racontent l’horreur qu’a subie Gisèle Pélicot, droguée et violée pendant des années pas son mari et par des dizaines d’hommes. Dans le monde entier, les lecteurs se passionnent pour cette affaire qui est rapidement passée du fait divers sordide au fait de société, symbole des violences sexuelles contre les femmes.
« Hasard du calendrier, pointe Libération à Paris, c’est à l’occasion de la journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes que le ministère public a amorcé hier ses réquisitions visant les 51 accusés. Vingt ans de réclusion criminelle, c’est la peine maximale encourue pour des faits de viol. Et c’est celle qui a été requise à l’encontre de Dominique Pélicot. »
Un réquisitoire annoncé et commenté partout dans le monde, donc… « Les procureurs du procès pour viols massifs en France demandent la peine maximale pour l’ex-mari de Gisèle Pélicot », lance le Washington Post. « Le courage de Madame Pélicot au cours de cette procédure éprouvante a contribué à faire d’elle une icône, pointe le quotidien américain, même au-delà de la France, pour les militants qui luttent contre les violences sexuelles. Gisèle Pélicot, rappelle le journal, avait en effet renoncé (au début de procès) à son droit à l’anonymat, et avait fait pression pour que les images des viols filmées par son mari soient présentées dans la salle d’audience, montrant qu’elle était inconsciente et inerte. (…) Le procureur a salué son courage et sa volonté de faire changer la honte de camp, afin qu’elle retombe sur les violeurs et non sur leurs victimes. »
En effet, commente le New York Times, « depuis qu’elle a pris la décision rare d’ouvrir le procès au public, Mme Pélicot est devenue une héroïne féministe. Alors que ses enfants et petits-enfants avaient honte de leur nom au début des débats, Mme Pélicot a affirmé qu’elle pensait qu’ils en étaient désormais fiers. “Aujourd’hui, je suis connue dans le monde entier, que cela me plaise ou non“, a-t-elle déclaré. “Les gens se souviendront de Madame Pélicot, beaucoup moins de Monsieur Pelicot“. »
Le Guardian à Londres rapporte les propos du procureur général : « cette affaire, dit-il, a bouleversé notre société dans notre rapport à l’autre. Il s’agit d’un changement fondamental du rapport entre les hommes et les femmes ». Et le Guardian de préciser que « cette 11ᵉ semaine du procès se poursuivra dans les trois prochains jours avec les réquisitions du ministère public concernant les peines à prononcer pour chacun des accusés. »
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« Sur les murs de la Cité des Papes, les tags ont déjà tranché, rapporte pour sa part Le Soir à Bruxelles. “Vingt ans pour chacun“, lit-on en lettres noires. “Vingt ans chacun X 51 violeurs = 1 020 années !“ crient des manifestantes devant le palais de justice. Ces féministes exigent le maximum contre ces hommes qui sont venus, pendant dix ans, violer une femme sédatée par son mari, s’exclame le quotidien belge. Quatre d’entre eux y sont allés six fois. Six s’y sont rendus à deux reprises, sans jamais se soucier du consentement de la victime. »
Enfin à lire dans le quotidien Le Temps à Genève, le point de vue de ce père de famille ordinaire, citoyen et responsable politique local. Il s’appelle Julien Wicki : « Face à ces horreurs, est-il acceptable, s’interroge-t-il, que le premier réflexe des hommes soit de se disculper en clamant “nous ne sommes pas tous comme ça“ ? La gravité des actes ne devrait-elle pas nous pousser à nous préoccuper des femmes qui les subissent ou pourraient les subir, plutôt qu’à nous préoccuper de nous-mêmes ? Ne devrions-nous pas explorer notre part de responsabilité au quotidien ? Ai-je mis le consentement au cœur de ma relation avec ma partenaire sexuelle, régulière ou non ? La violence sexiste est un poison qui suinte de toutes les couches de la société, affirme encore Julien Wicki. Pour l’en extirper, arrêtons de nous regarder le nombril et regardons-nous plutôt dans un miroir. Nous n’allons pas toujours aimer ce que nous y verrons, mais c’est pourtant nécessaire. Il est temps de balancer le hashtag #notallmen (“tous les hommes ne sont pas comme ça“) aux poubelles de l’Histoire, d’arrêter de se justifier et de travailler à devenir une part de la solution. Nous avons toutes et tous à y gagner. »
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